Vie d’Assurance


Durée : 2mn 50s

On nous dit que si les nouveau-nés crient à la naissance, c’est pour dégager leurs poumons et leur permettre de respirer… Et si c’était parce qu’ils avaient déjà peur de vivre ou peur de l’avenir..?

Parce que, à l’évidence, plus nous grandissons, plus la peur augmente.
La preuve ? Mais, la démonstration est très simple : Légalement contraints ou volontairement souscripteurs, nous n’avons de cesse de nous assurer.
Le plus dingue est que nous souscrivons des assurances-vie, des assurances-santé, mais aussi des assurances-vieillesse, des assurances-décès et même des assurances-obsèques. En quelque sorte, nous avons beau savoir que l’on va tous mourir un jour, … ce n’est pas grave : il faut que l’on s’assure sur ce risque certain.
Moi, par exemple, je suis assuré sur toutes sortes de risques : le vol, l’incendie, les intempéries, les risques de morsures des chiens, (le mien et ceux des autres), mes responsabilités civiles et pénales, les accidents, … C’est bien simple, je pourrais disparaître derrière la pile de mes contrats d’assurance.

En fait, j’ai l’impression que tout se passe comme s’il nous fallait une assurance tous risques pour la vie. En somme, une assurance pour un avenir tranquille. Un avenir où la plupart de nos actes, (et ceux des autres), seraient couverts par une police d’assurance.
D’ailleurs à ce titre, je me souviens du jour où, tandis que j’attendais tranquillement que le feu passe au vert au guidon de ma rutilante moto, une dame au volant de sa voiture de sport, regardant en l’air les panneaux directionnels, me fonce dedans à 60 km/h. Quelques minutes plus tard, alors que je reprends péniblement connaissance allongé sur le trottoir et que j’étouffe sous mon casque en attendant que les services d’urgence m’évacuent vers l’hôpital, j’entends cette charmante dame me confier : « Ne vous en faites pas mon p’tit, j’ai une bonne assurance ! ». Comme vous l’imaginez, je me suis tout de suite senti mieux.
Et voilà, Cqfd : je peux faire à peu près n’importe quoi, ce n’est pas grave. J’encoure moins de risques et les conséquences de mes actes sont décorrélées de mes responsabilités !
Ça, c’est la belle vie ! Je ne suis plus responsable. Coupable, parfois, mais plus responsable (Tiens, tiens, cela me rappelle quelque chose… et même quelqu’un).

L’ennui est que je me rends compte parfois, parfois seulement, que je n’ai plus vraiment de pouvoir de décision, … plus de prise sur ma vie. Bon, mais pas de panique. Le médecin me dit que je présente tous les signes d’une dépression, alors je prends les médicaments qu’il me prescrit. D’ailleurs, je me vaccine aussi. Il faut que mon corps apprenne également à perdre l’habitude de se défendre tout seul. Les médocs de la Sécu sont faits pour cela.
Du coup, je suis si bien assuré que certains me prétendent assisté, limite dépendant. Et bien oui, je le revendique ! Si pouvoir compter sur un organisme, une caisse, ou un truc du genre, c’est être assisté, je le suis. Et alors ? Alors je cotise pour ça ! Et je fais même vivre aussi l’État ! Oui c’est ça, l’État !
Et au juste, qu’est-ce qu’il fait l’État pour régler tous mes problèmes et pour m’assurer une vie meilleure ? Attention, la mienne de vie ! On parle de ma satisfaction personnelle. Parce que je suis un individu qui a des droits. Et le premier d’entre eux s’appelle la liberté individuelle. C’est tout de même le plus important. Non ?

Moi, je pense que c’est son rôle à l’État. Et puis, et puis, il doit me permettre de consommer plus. Cela s’appelle le progrès social. Parce que lorsque je consomme, je me réalise, je m’émancipe, mieux encore … j’existe !
Alors l’État n’a qu’à prendre ses responsabilités. Mais voilà, il faut bien l’avouer, l’État est trop libéral et laxiste… surtout pour les autres. Mais stop !  Oh là là ..! Moi, je ne fais pas de politique. La politique et l’économie, je ne comprends pas tout. Je n’ai pas assez d’instruction.
Mais voyez-vous, il y a des trucs incompréhensibles. Par exemple, lorsque l’on travaille, il nous faut une assurance-chômage et une assurance-retraite. Normal, je dirais même plus, j’adhère ! Mais un jour, j’ai moi-même été au chômage – Bon, pas grave le truc. Ça arrive à tout le monde maintenant, et puis j’étais assuré – On m’a alors expliqué qu’il fallait que je continue à payer une assurance-chômage ?! Vous me suivez ? Et bien, c’est pas fini … J’ai un copain qui m’a dit que même à la retraite on pouvait continuer à travailler volontairement, mais qu’il fallait continuer de cotiser pour … le risque de chômage… et aussi pour une retraite qui ne compterait pas. Il paraîtrait que c’est à cause de la solidarité et des inégalités collectives… Meuh non ! Tout le monde le sait, ils le disent à la télé : pour qu’il y ait moins de chômage, il faudrait plus de croissance !

Au fait, la croissance … On en parle, ou bien … Non, parce qu’un jour, il faudra qu’on fasse plus que d’en parler. Mais là, tout de suite, je n’ai pas le temps. Il faut que j’aille m’acheter l’IPhone 12.3.

*****

Dans l’espérance
Je loge dans l’assure rance
Et à outrance

Vie en gérance
Sans aucune fragrance
C’est l’errance

Dans une souffrance
Où je fais allégeance
Et c’est tendance

Alors, j’avance
Inquiet pour mes finances
J’attends la quittance

En résilience
C’est ma seule assurance
Pour ma délivrance

 Découvrez la suite de l’illustration poétique de Didier REGARD

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***
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1 commentaire

  1. A reblogué ceci sur Apprendre mieuxet a ajouté:
    Bonjour.

    J’ai l’habitude de lire avec la plus grande attention les livraisons régulières de Pascal Launay, et je m’en réjouis. Surtout que cette fois-ci c’est carrément du grand art, et je pèse mes mots !

    J’ai dû m’interroger, oh, deux grosses secondes, sur la pertinence de l’idée de rebloguer ce petit bijou sur mon propre blog (mes lecteurs ne trouveront-ils pas cela « hors sujet » ?…), et puis j’ai tranché (pourquoi les réflexions auraient-elles besoin d’être longues pour être mûres, mmmh ?).

    Alors voilà. Bien que n’ayant souscrit aucune assurance « perte de lecteurs », je me permets de vous refiler ce (beau) bébé, en vous souhaitant simplement de vous régaler autant que moi.

    J’aime

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