Difficile de ne pas échapper cette semaine à l’annonce du décès de Charles Aznavour, tant les organes d’information se sont appliqués à recueillir tous les éléments propres à nous tirer des larmes aux yeux.
Mieux encore, la presse, les chroniqueurs de tout poil, les biographes autorisés ou pas, se sont appliqués à nous persuader que l’auteur, le chanteur, le comédien, le fils d’émigrant, l’homme providentiel de l’Arménie, n’était pas seulement un grand artiste mais un grand Homme, que dis-je, un exemple pour la France, un exemple pour l’Humanité !
La seule critique, oh très subtilement amenée, qui m’a été donnée d’entendre furtivement cette semaine, a été celle de Claude Lelouch. Le cinéaste a expliqué en toute fin d’interview que, peut-être, mais alors peut-être, la seule chose que l’on pouvait ne pas aimer dans le grand homme, était le tort qu’il avait fini par avoir, de croire qu’il en était un.
Mais pour tous, plutôt que de l’orgueil, cela procédait plus d’un début de carrière particulièrement difficile que d’une tête gonflée à l’hélium des honneurs. Plus jeune, Charles Aznavour avait dû subir « des lazzi et des quolibets« . Bref, des insultes d’une rare violence, à une époque où les critiques étaient moins policées que de nous jours.
Pour qu’ils expient leurs crimes et fassent amende honorable, on n’a d’ailleurs pas manqué de ressortir de leur placard les affreux personnages encore en vie.
C’est qu’il avait la rancune tenace, le petit Charles. Pour preuve, son installation en Suisse depuis cette brouille ridicule avec le fisc français. La Suisse, certes, mais tout de même un petit pied à terre près de Paris et un autre dans les Alpilles. Mais brisons là mes seigneurs ! Charles avait toujours raison. Et d’ailleurs, un non lieu, puis un titre de Commandeur de la Légion d’Honneur, vinrent ponctuer définitivement l’épisode malheureux.
Les enchères liées à ses qualités sont montées à des niveaux rarement égalés. C’est simple, Charles Aznavour n’avait aucun défaut. Aux dires de son fils, il était un surhomme.
Croyez-vous que les trompettes de la renommée aient épuisé les musiciens ? Que nenni ! Elles ont plutôt assourdi quelque temps le paysage médiatique et réduit à la portion congrue les autres nouvelles du monde. Bien sûr, d’ici quelques temps, à moins que l’on assiste à une bataille autour de sa succession, ou qu’un héritier surprise surgisse de sa boîte, d’autres nouvelles du monde, les faits divers et les grèves dans les transports, reprendront leur droit. Mais pour l’heure, la grosse caisse tonne à plein tympan.
Vous me trouvez cynique, peut-être même un brin jaloux ? N’en croyez rien ! C’est juste qu’à trop manger, j’ai parfois temporairement du mal à digérer. Car, « entre nous, je l’avoue« , je ne compte plus les chansons qui ressurgissent du tréfonds de ma mémoire. C’est d’ailleurs l’occasion de les réécouter, et de m’étonner que j’en connais une pleine fournée.
Charles Aznavour avait la grâce d’illustrer les tranches de vie et l’art de ciseler les mots.
Ce qui m’a plus particulièrement impressionné cette semaine ? C’est d’apprendre qu’il n’avait pas 30 ans, lorsqu’il a écrit « Hier encore (j’avais 20 ans)« . Pour le coup, on dirait bien que Charles Aznavour était un grand visionnaire !
Charles Aznavour sur scène, il y a 5 ans : Hier encore, j’avais 20 ans
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L’illustration de ce billet d’humeur par Didier Regard
Sous le grand Charles
Débute le petit Charles
Même si tu tirais sur lui
Pour Tobrouk , il prenait le taxi
Et il faisait le tour des langues
Qu’il n’avait pas dans sa poche
Pour initier un big bang
Chez les peuples qui lui étaient proches
Avec ce rôle d’ambassadeur
Qu’il acceptait avec candeur
Et qui avive nos pleurs
Aujourd’hui c’est la petite Edith
Sa marraine qui l’invite
À rejoindre sa suite
Dommage pour l’Arménie
Et tous les pays
Où il chanta l’envie
L’envie d’être grand
Parfois dissonant dans son chant
À bientôt Aznavourian
Découvrez les poèmes de Didier Regard et aussi ses tercets
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