Je suis bien évidemment bouleversé par les attentats de Paris.
Un sentiment sans doute insignifiant, comparé à ce que vivent les blessés et les familles des victimes. Mais c’est un fait, je suis tout à la fois triste, consterné et perdu. Je ressens un trouble profond, comme une angoisse que je n’ose avouer, mais toutes les émotions que je traverse sont également empruntes d’un grand découragement.
Difficile de ne pas être bouleversé lorsque l’on est une personne relativement équilibrée, et qui ne vit pas sous l’influence d’un fanatisme aveugle ou dans la haine d’autrui. Difficile de ne pas ressentir une sincère compassion. Mais aussi difficile de ne pas se projeter au coeur d’un drame que l’on n’a pourtant pas vraiment vécu.
Comme des millions de personnes, je n’ai pas été personnellement exposé. Je n’ai pas été atteint dans ma chair. Aucun proche, aucun membre de mon entourage, pas même une simple connaissance, n’a disparu ou n’a été blessé. Cela aurait pu l’être, mais ce n’est pas le cas. Je n’ai pas non plus fait partie d’une équipe médicale ou de secours. Je suis même de ceux qui ont très vite choisi de ne pas s’exposer aux images, ou au défilement ininterrompu des reportages. Je me suis contenté de me tenir informé, une fois par jour.
Pourtant, je suis psychologiquement atteint.
C’est d’ailleurs très étrange. Provincial depuis près de 15 ans, je suis plus touché par ce qui vient de se passer, que lors des attentats de St Michel, alors que cela faisait plus de 20 ans que je prenais le métro et le RER, quotidiennement.
Depuis 15 jours, je me réveille un rien angoissé, sans qu’il n’y ait un motif rationnel à cela. C’est idiot! De part mon mode de vie actuel, j’ai sans doute une probabilité infinitésimale qu’il m’arrive quoi que ce soit.
Et pourtant, comme des millions de gens, je suis marqué au plus profond de moi par cet acte que je ne comprends pas. Est-ce précisément parce que je ne le comprends pas, ou est-ce plutôt parce que je sais que je vais l’oublier dans un trop proche avenir, sous prétexte, comme je l’entends tellement dire à tort et à travers, « qu’il faut que la vie reprenne ses droits » ?
Après combien de minutes de silence, de marseillaises, de slogans patriotes, de déclarations enflammées, et d’hommages politiques, vais-je au bout du compte oublier ? Peu à peu, je ressens déjà de la lassitude. Peu à peu, j’en note en maintes occasions le côté factice et surjoué. J’en ai honte de l’écrire, mais j’ai déjà la sensation d’une indigestion. Oh Bien sûr, toutes ces manifestations d’unité, de compassion et de solidarité, sont aussi nécessaires qu’indispensables. Mais une question me taraude l’esprit : certains n’hésiteraient-ils pas à en tirer profit ? Qui, pour obtenir une voix de plus ; qui, pour conserver un mandat ; qui, pour je ne sais quel intérêt personnel … ?
Alors voilà, plus qu’un exorcisme collectif salutaire, plus qu’un instrument politicien indigne, plus que des proclamations libertaires provocatrices, j’aurais aimé voir une prise de conscience et une réelle occasion pouvant donner naissance à un sursaut international, durable et plus humaniste. Mais je redoute que toutes ces déclarations de « l’après » ne durent que l’instant d’un colloque international.
Secoué, donc, comme beaucoup, mais également découragé par tout ce qui se passe depuis ce funeste vendredi 13.
Tandis que j’y vois une sérieuse remise en cause du système et de l’équilibre, ou plutôt du déséquilibre de l’ordre mondial, je me rends compte de la vanité des réactions du monde « libre et vertueux » autoproclamé.
Certains penseront certainement que je fais de la démagogie, du catastrophisme, ou je ne sais quoi d’autre, mais je vois dans ces événements, la faillite du monde occidental, la faillite de nos démocraties modernes et du fonctionnement des institutions internationales. Manque de vision, manque de charisme, manque de projets … Je suis peiné et pas vraiment fier de léguer un tel monde à mes enfants. Pas vraiment fier non plus d’appartenir à un pays aux grands principes affichés, mais pourtant « va t’en guerre », et qui fait partie du wagon de tête des producteurs d’armes mondiaux.
Si je suis tant découragé, c’est que je reste intimement persuadé que les dispositifs sécuritaires et les appels au branle-bas de combat, pour rassurant qu’ils se veuillent, ne correspondent certainement pas à une réponse adaptée. En tout cas, il faudrait au moins reconnaître qu’elles ne se suffiront pas à elles-mêmes.
Je ne prétends pas savoir ce qu’il faudrait faire, mais l’histoire de ces 30 dernières années ne nous a t-elle pas montré ce qu’il ne fallait pas faire ? Car, tout se passe comme si nous n’avions rien appris : Gaza, le Liban, l’Iran, l’Irak, l’Afghanistan, Al Qaïda, le Mali, l’Égypte, la Libye, la Syrie, …, le financement, la formation et l’armement de groupuscules dits « modérés » qui se retournent au gré des multiples factions incontrôlables… Aucune de ces réalités ne nous aura donc rien appris.
Après les attentats de Paris, nous intensifions les frappes aériennes sur une région où les raids américains et russes se comptent déjà par milliers, avec les résultats que nous savons.
Nous nous félicitons d’avoir frappé des bases de Daesh, soit. Mais nous avons fait au passage des dizaines de morts, dont des femmes et des enfants, et sans nul doute, avons donné naissance à plus de terroristes et d’imams salafistes intégristes que ceux déjà implantés dans nos propres pays.
Il semble donc que nos dirigeants n’aient à proposer que le déclenchement d’une guerre totale visant à exterminer ceux du camp d’en face.
Tant de questions se bousculent dans ma tête : n’est-ce pas vers l’escalade de la violence et de la barbarie que les terroristes veulent nous entraîner ? Sommes-nous si certains que notre mode de vie est le seul qui vaille, et qu’il doit s’imposer à tous, et en tout point ?
Je suis probablement un grand idéaliste, aux idées simplistes de surcroît, mais je reste persuadé que c’est un nouveau projet de société, un avenir différent, qu’il faudrait proposer à la jeunesse du monde entier. J’y vois notre meilleure chance de les rendre aveugles et sourds aux propagandes de haine, de quelque bord qu’elles viennent.
Il est vrai que la mode n’est pas aux actes insufflés par des valeurs de partage, de miséricorde et d’amour, mais je veux croire qu’il est encore possible d’apporter sa petite pierre à ce bel édifice. Alors je vais tenter de me remettre à l’ouvrage, même si, j’avoue manquer ces derniers temps de conviction.
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Moi, j’ai un soupçon
Alors je coupe le son
C’est beaucoup trop con
Tout est factice
Et j’en suis le complice
J’ai des indices
Le n’importe quoi
Importé du temps des Rois
Est en cet endroit
Des unions de façade
Que ne renie pas Sade
J’en suis malade
Plus rien comme avant
Me laissant beaucoup de temps
Être … méditant …
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