Coupable, je veux être responsable !

Durée de lecture : Environ 3 mn

Éloah, je plaide coupable et je te demande pardon.
Au nom des précédentes générations et de la mienne, j’implore ton pardon, nous qui n’avons pas su garder notre terre nourricière aussi pure que toi, qui vient tout juste de naître.
Permets-moi cependant de t’accueillir en osant ouvrir les bras, en témoignage d’un formidable espoir : celui d’un meilleur avenir. Un avenir que j’aimerais tellement avoir le temps de construire pour toi.

Je ne vais pas te mentir, la tâche est ardue tant il me semble souvent que l’humanité courre… éperdue. J’espère tant que tu ne le découvres pas à tes dépens, mais ce sont bien, le pouvoir, le sexe, la possession et l’argent, qui influencent trop puissamment  l’humanité.
Et cela ne date pas d’hier, mais de plusieurs dizaines de millénaires, lorsque l’homme a décidé de se sédentariser, lorsqu’il a eu conscience qu’il avait quelque chose à défendre, et quand d’autres on eu envie de l’acquérir.

C’est ainsi que toutes les générations qui t’ont précédée ont eu leur lot de combats à mener. La peur, l’appréhension, les ont saisis, quelques poussées de fièvre les ont portés, mais le courage les a également stimulés.
Chacune aurait pu se retourner contre les précédentes devant les erreurs commises, mais au bout du compte, chacune a tenté de faire face. Je n’en connais pas qui puisse affirmer avoir connu pour tous, l’égalité, la paix, la liberté et en prime, l’assurance d’être rassasié. Et si certaines ont fait de remarquables avancées, d’autres se sont grandement fourvoyées.

Des inégalités, des guerres, des génocides de peuples indigènes ou tout simplement des plus faibles, il y en a eu beaucoup. Il y en a encore. Le pillage des ressources, la destruction des écosystèmes, l’ablation des poumons de la terre, le raclage des fonds marins, la digestion des énergies fossiles, … Tout cela s’est développé au rythme toujours croissant de la multiplication des hommes.
Il fut peut-être un temps où la terre a été un paradis pour certains, mais jamais pour le plus grand nombre. Faire croire le contraire est un mensonge. Faire croire qu’il puisse en être autrement est une utopie.
Les Hommes sont ainsi faits qu’ils veulent chacun leur part d’un gâteau ou de l’idée d’un bonheur dont ils rêvent. Seulement, certains sont plus gourmands que d’autres, et la gourmandise, n’est pas seulement un vilain défaut, elle est plurielle et boulimique.

Les dernières générations, dont celle à laquelle j’appartiens, ont été somme toute brillantes, mais tellement destructrices. Cela ne sert à rien de dissimuler la réalité : nous sommes coupables en ces temps modernes d’avoir accéléré les processus déjà engagés et de les avoir sophistiqués… en conscience.
Mais je t’en supplie, Éloah, méfies-toi des constats manichéens s’appuyant sur des vérités tronquées ou dogmatiques !
Chômage, violence, idéologies détruites, pollution et Sida pour les jeunes d’aujourd’hui ; contre plein-emploi, paix, liberté, paradis terrestre et avenir pour les anciens, qui auraient de plus vécu à crédit sur les générations futures : simpliste, et même quelque peu inexact. Ce sont des constats inertes qui ne servent qu’à renforcer les clivages et exacerber les haines.
Et puis, les besoins des uns et des autres peuvent être si différents… À l’évidence, vivre dans l’hémisphère Nord ou Sud, ou encore naître fille ou garçon dans certains pays ou au sein d’une favela à la périphérie de Rio, ne suscitent pas les mêmes aspirations.

Il n’en reste pas moins que nous sommes aujourd’hui devant des problèmes éthiques.
La poursuite de la croissance, la recherche et le développement technologique, comme sésames absolus vers un mieux-être artificiel, ont des conséquences de plus en plus directes et prégnantes dans tous les domaines. Ceux de l’écologie et de la santé ne sont pas des moindres. Mais il est un autre danger qui nous guette : la démagogie et l’absence de projet « politique et social ». Il favorise le lit de nouveaux modèles de société en tout point dangereux pour l’Humanité. Certains font illusion, nous broyant de mains gantées de velours, quand d’autres tranchent les têtes, maniant la hache avec dextérité.

N’en déplaise à certains, le système ne s’autorégulera pas. Tous nos modèles sont épuisés. Il ne connaîtra pas non plus un renouveau en cherchant à dresser les uns contre les autres, riches et pauvres, Nord et Sud, ou en opposant anciennes et nouvelles générations.
Dans ce monde qui semble donc courir à sa perte, à quoi bon lancer des anathèmes ou chercher des clivages stériles supplémentaires. Au triste jeu des comparaisons, je ne saurais dire s’il y aura un gagnant.
Tout au contraire, j’aimerais, petite Éloah, que ce soit l’occasion pour nous de saisir une chance extraordinaire. Le monde est à réinventer !

Pour autant, il n’est point nécessaire de jeter les bébés avec l’eau des machines à laver.
Il ne s’agit pas de gommer toutes les avancées, économiques, technologiques, sociologiques et culturelles, parfois chèrement acquises, tout au long de l’histoire de l’humanité.
Non ! Il faut penser autrement la croissance et le progrès, et retrouver « L’esprit des Lumières ».
Aujourd’hui, un bon début serait de replacer l’Homme au centre de notre société, et de se battre ensemble pour une meilleure utilisation et un meilleur partage des ressources.
Et pour cela, sans aucun doute, toutes les énergies et toutes les générations, toutes les ressources humaines décidées à s’unir autour de ce projet, seront bien nécessaires.

Avant-hier, Éloah est née.
Serons-nous suffisamment responsables pour lui transmettre un monde où elle puisse y grandir, faire ses propres choix et les assumer pour les générations qui lui succéderont ?

*****

Ainsi, tu es là
J’avais pas vu l’agenda
Douce Éloah

Un peu pris de court
Car tu es le seul recours
Sur mon carrefour

Celui du pardon
Avec toute ma caution
Tu es le chaînon

De cette affection
La mithridatisation
Est la solution

Ce n’est pas badin
S’inoculer le venin
Pour être là demain

Cela donne envie
Voir le monde par ta vie
Me ragaillardit

 Découvrez la suite de l’illustration poétique de Didier REGARD

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