Les pratiques électorales de mon île d’adoption n’en finissent pas de m’étonner.

Déjà, aux Européennes, des spécificités m’étaient apparues : une seule personne pour tenir le bureau de vote, pas besoin de carte d’identité, pas besoin de passer par l’isoloir (sauf pour ceux qui y tiennent vraiment), pas besoin de prendre plusieurs bulletins puisqu’un seul suffit, et si je n’avais pas bien vu, le monsieur devant moi a dit tout haut pour qui il venait de voter. La transparence, quoi !

Je croyais donc avoir été au bout de mes découvertes, mais que nenni !

Pour le 1er tour des Législatives, des fois que l’on soit un peu perdu entre l’apprenti sorcier, les extrêmes, les sans complexes, et les anonymes, chez nous, monsieur le Maire vient à notre rescousse. En premier lieu, il nous écrit sur papier. En second lieu, il envoie un SMS (sans doute pour ceux qui ont toujours eu peur de recevoir du courrier). Et ce qu’il nous écrit est limpide :

« Mesdames, Messieurs, chers électeurs, chers amis. Dimanche prochain, aura lieu le 1er tour des élections législatives (pour les étourdis), je vous informe que je soutien mon ami XXX XXXX, député sortant (pour ceux qui ne le connaissent pas) et vous demande de lui apporter massivement vos suffrages ainsi que celui de vos familles et de vos proches (vous êtes mes amis, et les amis de vos amis sont ses amis). Je vous remercie par avance et compte sur vous, signé : YYY YYYYY maire de ZZZZZZ. »

Limpide, je vous avais dit ! Ici, le RGPD, la protection et la non utilisation des données personnelles, cela n’a pas pris.

Alors, nous sommes allés votés. Pour les Européennes le bureau était vide, mais ce dimanche il y avait plus de monde qu’à l’unique bar du village à l’heure de l’apéro. Il y avait même un président et deux assesseurs. Et quand je suis entré, le silence s’est fait instantanément. Toutes les têtes se sont braquées sur moi. Et ben vous savez quoi, moi, je n’ai pas finassé. J’ai pris avec ostentation le bulletin qu’il fallait prendre, et je l’ai mis dans l’enveloppe avant de glisser le tout dans l’urne.

A voté ! Ai-je entendu avant que les conversations ne reprennent.

PS : Bien sûr, je vous écris tout ça parce que je sais que mes amis ont de l’humour.