Cette semaine, j’ai vu s’envoler un ange


Quelles sont ces étranges relations qui unissent un être humain à son animal de compagnie ?
Le sujet vous semble futile ? Méfiez-vous de juger trop hâtivement. Méfiez-vous des phrases poussant à relativiser. Des phrases pourtant pleines de bon sens : « ce n’était qu’un animal », « il y a plus grave dans la vie », … C’est vrai, évidemment. Mais lorsqu’on ne connaît pas l’intensité que peut avoir une relation entre un maître et son chien (ou son chat), il est difficile de l’imaginer ».
Je dédie ce billet d’humeur à toutes celles et tous ceux qui ont perdu un jour un animal de compagnie et qui, 
pour quelque motif que ce soit, n’ont pas pu, ou pas oser, exprimer leur douleur.

Je l’ai soulevée délicatement pour la prendre dans mes bras et nous avons fait quelques pas ensemble. Nos derniers pas. Il y a quelques secondes encore, si alerte, aérienne et virevoltante, si lourde maintenant. Habituellement si bruyante et cancanière, tellement silencieuse à présent.

Il n’a fallu qu’une minute, et j’ai vu s’envoler un ange. Comme c’est fragile une vie !
Entouré de vagues de chagrin et de cris aigus, je me trouve dans la situation d’un médecin venu constater un décès par accident. Tout se passe comme si l’événement restait délibérément enfoui au plus profond de ma tête. Non pas par incompréhension, ou par refus de la réalité, mais comme si mon cerveau ne voulait pas me submerger. Je calme, je console, je tente de relativiser, … Je ne le sais pas encore, mais le venin de mes émotions descend vers mon cœur, avec l’efficacité mécanique d’un goutte-à-goutte.
Mon acceptation a été aussi foudroyante que l’accident. C’en est presque étrange. Pas de jugement, pas de colère, un léger sentiment de culpabilité, et surtout, oh oui surtout, une immense peine.
… Les heures passent. Pour tenter de gommer les images funestes, les smartphones font ressurgir quelques photos, parfois même une courte vidéo. De faibles sourires, infiniment affectueux, finissent par se glisser timidement entre souvenirs et tristesse.

Je revois sa petite tête, son poil si fin, soyeux et agréable à caresser, je revois … Je me doutais que notre lien était étroit. En y repensant, je m’aperçois qu’il était unique.
Avec elle, nul besoin de faire illusion. Nul besoin de tricher. Il m’arrivait de lui confier mes moments de déprime et de fragilité, et sa seule présence me réconfortait lorsque mes curseurs s’affolaient. Elle était une interlocutrice d’une patience inépuisable, sans jugement, et peu contrariante. Elle faisait preuve d’une loyauté et d’une affection inconditionnelles. Fine observatrice, et sachant jauger mon état d’esprit du moment, elle savait s’adapter. Tantôt discrète, tantôt envahissante, elle pouvait même chercher à me distraire … avec évidemment ses propres codes, (j’avoue ne pas avoir été souvent très enclin à me divertir, dans les mauvais jours, en acceptant de jouer à la balle). Mais c’est un fait : elle a beaucoup œuvré pour mon équilibre.
Nous étions en confiance. Sans doute parce que j’étais là. Sans doute parce qu’elle était là.

Oh, ce n’était pas une sainte, ni un modèle de vertu. Elle était voleuse de croquettes de chats à ses heures, … à toutes les heures. Elle était prête à faire des folies pour du chocolat. Elle était aussi gourgandine que jalouse. Et puis, elle avait cette furieuse passion pour les tuyaux d’arrosage qui lui valut des menaces de retour à la SPA auxquelles, bien sûr, je ne croyais pas moi-même…

Avec ses grands yeux pétillants, ses mimiques et ses allures de cabri, elle représentait la fraîcheur et la gaieté incarnées à nos côtés. Nous ne savions pas que Louna occupait une place si particulière au sein de notre famille. Nous ne le savions pas, mais elle faisait partie de notre vie, et déjà sa présence nous manque.
Oui, elle me manque. Sa frimousse me guette derrière la porte, sous chaque fenêtre, dans chaque recoin de la maison. Parfois même, je m’étonne qu’elle ne soit pas sur mes genoux… Il m’en faudra du temps, pour oublier nos rituels.
…Cette semaine, j’ai vu partir Louna. J’ai vu s’envoler un ange.

*****

Cette semaine, Didier Regard nous transporte …

Il me fallait…
Encore vivre
L’éclair de notre présence

Vivre le lien défait
Dont on parle dans les livres
Mais avec une distance

Là, c’était devant moi
Je devais vivre le chagrin
Repenser mon attachement

Faire le deuil dans l’émoi
D’une caresse de la main,
D’un regard sans tourments

Je bénis et je maudis
Ma mémoire
Qui va figer ces souvenirs

Mais, bien qu’étourdi
Il me fallait percevoir
Qu’un jour, il faudra s’assoupir

Découvrez les poèmes de Didier Regard et aussi ses tercets

*****

Vagabondez dans mon univers, vous découvrirez des nouvelles et des romans, les poèmes de Didier Regard, et aussi les chansons de Marie. Aimez, commentez et partagez sans modération, et surtout, abonnez-vous pour ne pas rater les prochains billets !

Le contenu de Launayblog est sous Copyright déposé auprès de Copyrightdepot.com
Poster un commentaire

5 Commentaires

  1. Comme vous m’avez fait pleurer, Pascal… car mon petit bébé poilu s’en va tout doucement lui aussi. Je sais que ce n’est qu’une question de temps ~ très court ~ avant que je ne doive lui dire adieu et l’amener pour un dernier voyage en voiture… rien que d’y penser, j’ai le cœur en marmelade et le Salto Angel s’écoule de mes yeux. Dans un sens, je crois qu’il est déjà mort car il ne voit plus, n’entend plus et son cerveau ne semble plus être là, bien souvent. Il passe des heures assis dans le milieu du corridor à fixer le mur, ne répond plus à mes appels ni à mes caresses… comme si je ne caressais plus qu’une coquille vide… puis, il ne se souvient plus, bien souvent, qu’il doit sortir pour ses petits besoins… 😦

    Oui, ces petites boules de poils nous volent notre cœur, envahissent notre vie, nous enroulent autour de leurs petites pattes (peut pas dire petits doigts lol) et s’offrent entièrement à notre amour nous offrant le leur inconditionnellement.

    Que vous dire sinon que je compatis avec votre douleur d’âme… la peine va s’atténuer mais pas les souvenirs.

    Aimé par 1 personne

    Réponse
  2. J’ai perdu mon chat Arthur…il y a 38 ans, en 24 heures. Le temps a passé mais la blessure est toujours là. Et tes mots Pascal, si justes et si pudiques, m’ont touché au plus profond.
    Le lien qui nous unit à ces petits êtres est unique. Sans doute parceque nous ne parlons pas la même langue : la communication se fait par les yeux, directement branchés sur nos âmes

    Aimé par 2 personnes

    Réponse
  3. Je suis avec toi dans ces moments-là Pascal. Et j’en profite pour te dire que j’ai adoré – vraiment adoré – Secret Meurtrier. J’ai hâte de t’en parler de vive voix !

    J’aime

    Réponse
  4. Sylvie

     /  1 Mai 2018

    Ma soeur me disait que lorsqu’on adopte un animal, c’est pour souffrir mais avant tout pour partager de merveilleux moments. En 2012, Rex nous a quitté quelques semaines après notre accident. Il était le 5ème élément de la famille. Il est parti en laissant un grand vide mais beaucoup d’heureux souvenirs. Le temps aide à panser les maux et c’est le coeur plein de gratitude et d’amour qui nous a mené au refuge de l’ASPA de Manosque. Nous y allons régulièrement pour promener les toutous, donner de notre temps, de notre affection pour nos « petits poilus » et je vous garantis que nous en recevons beaucoup en retour…

    Malheureusement ce refuge est menacé de fermeture (comme beaucoup d’autres en raison de la suppression des contrats aidés – Une pétition est en ligne pour les aider). Nous espérons que cela ne se produira pas.

    Merci pour ce partage, pour cette émotion qui nous fait nous sentir encore plus humain.

    Aimé par 1 personne

    Réponse
  1. Cette semaine, j’ai vu s’envoler un ange — Billets d’humeur et Passions d’auteur | jean-louis.riguet-librebonimenteur

Laisser un commentaire