Silence, je fais retraite !


Écrit depuis quelques jours, ce billet d’humeur vous parviendra alors que j’aurai débuté ma retraite d’automne au monastère de Ganagobie.

Certains d’entre vous le savent peut-être, les moines bénédictins de Ganagobie ont le verbe rare. À l’exception du père hôtelier chargé de l’accueil des retraitants, et de ceux dont la fonction nécessite des contacts avec l’extérieur, ils ne sont guère liants. Vous n’entendrez aucun d’entre eux dire bonjour ou demander du sel à son voisin. Il est vrai qu’ils sont si peu nombreux, que je les vois mal s’apostropher d’un bout à l’autre de la table du grand réfectoire.
Notez bien qu’ils ont des temps de « récréation » pour se parler : deux quarts d’heure par jour pour échanger sur l’essentiel et partager les consignes quotidiennes. Pour le reste, comme Saint Benoît l’a précisé dans sa règle monastique, tout n’est que bavardage superflu.
Du côté des retraitants, la règle hors de l’enceinte close est suivie d’une façon plus aléatoire et selon les affinités. Toutefois, il n’est pas coutume d’importuner ceux qui souhaitent rester en retrait. Ici, tout le monde respecte le silence d’autrui, même si le père hôtelier tend à favoriser les échanges, à l’issue du déjeuner lors d’un café pris en commun. Je dirais que la prise de cette boisson chaude figure en option gratuite dans la « formule tout compris » de l’hospitalité des moines.

Il s’agit de ma quatorzième retraite, et pourtant celle-ci est une véritable première.
J’ai décidé de couper l’image et le son du monde moderne, et de me soustraire totalement à ses sollicitations incessantes. Mais ce n’est pas tout. J’ai aussi décidé de respecter, à la lettre, la règle du silence selon Saint Benoît. Comme on dit familièrement, je compte la fermer pendant toute la semaine.
Jusqu’à maintenant, je n’omettais jamais d’emmener mon téléphone portable – sans le dire à personne ;-). En mode silence (évidemment !), et je me connectais chaque jour afin de vérifier qu’aucun message important et urgent ne soit dans l’attente d’une réponse, non moins importante et urgente. Oh, je ne fais pas partie des accros du SmartPhone, mon entourage ne manque pas d’ailleurs de me reprocher de me faire rare au téléphone – au passage, saviez-vous que 13% des possesseurs de Smartphone développent une réelle addiction ? 700 millions de malades dans le monde ! -. Pour ce qui me concerne, l’objectif était surtout de me rassurer en gardant un lien potentiel et clandestin avec mes proches, mais aussi d’écouter en douce les soubresauts du monde. Une sorte de « joignable au cas où », matinée d’un léger voyeurisme… Croyez-vous que je fasse partie des malades addictifs ?

Cette semaine, je tente donc de cumuler absence de parole, jugement rare sur autrui, et travail personnel intérieur sans escale.
7 jours et 8 nuits sans parler, mais aussi sans faux semblant, sans faire semblant, sans mensonge, sans médisance, sans chercher ni à briller, ni à m’opposer, ni à m’imposer, sans à me comporter comme si …
7 jours et 8 nuits sans prêter attention aux bruits du monde.
À quoi bon ? Je ne sais pas vraiment. Est-ce le besoin irrépressible de plonger dans les abysses de ma foi à la recherche toujours insatisfaite du sens de ma vie ? Le silence sera-t-il pour moi une réponse ? À moins que ce ne soit la quête du réconfort et de la paix du silence intérieur… Ou bien serait-ce tout cela à la fois ? Peut-être le saurai-je enfin dimanche prochain.

Alors, juste un dernier mot … Chûuuut !

*****

Et toujours, l’inspiration du poète 

Bonjour Pascal….

Ce dont on ne peut parler, il faut le taire
Disait Wittgenstein dans le Tractatus

Au revoir Pascal….

Le reflet de la lune sereine accompagne mon départ
Peut-être ma nouvelle arrivée ?
Va savoir

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7 Commentaires

  1. Bien, mon ami! Mais le silence n’est pas que relié à la foi, le silence se devrait d’être partie intégrante de notre vie… mais nous vivons dans un monde tellement bruyant, rempli de bavardages inutiles, de bruits incessants, de bruits de fond continuels. Entrez dans un resto, un pub ou un endroit publique et on se croirait dans un poulailler plein de jacasses étourdissantes. Et pourtant, le silence est tellement vital à notre vie et à notre santé.

    Je vous envie de cette retraite. Cela me rappelle qu’il y a bien longtemps, les sœurs du couvent nous avaient amenées faire une retraite de 4 jours. Nous n’étions que très peu… une dizaine de filles peut-être, au max (dont seulement 2 ont réussies à rester pour ces 4 jours, moi étant l’une d’elles). Comme j’avais aimé… juché sur un petit promontoire, le monastère des Bénédictins était tellement paisible, la vue imprenable, la bouffe super simple, fraîche et végétarienne, l’eau de source pure et cristalline, l’ambiance élevante même pour une non-chrétienne comme moi. J’ai aimé car, durant les qq rares conversations avec le frère-relation, nous parlions librement de la foi, des croyances et rituels et, malgré nos différences, nous nous entendions à merveille. Combien d’heures passées dans les jardins magnifiques, à méditer dans une nature respectée et paisible. Mais le silence… le SILENCE! C’était merveilleux surtout quand on sait que chez-moi, ma mère allumait radio ET télé dès son lever et ne les fermaient que quand elle allait se coucher… jamais un moment de paix et de silence… et elle jasait tout le temps… et si je gardais le silence, elle s’inquiétait, me questionnait et jasait encore plus… maintenant, je ne peux endurer radio et télé qui jouent dans le fond. Oui, regarder un film mais ensuite, elle se ferme vite la télé… et le radio que je possède n’a jamais été allumé.

    Un monde de silence… sans agitations inutiles… un rêve!

    J’espère que votre retraite vous aura apportée beaucoup de paix intérieure.

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    • Ce que vous me racontez me touche.
      Figurez-vous qu’une personne rencontrée sur place cette semaine a vécu la même expérience que la vôtre étant enfant. Elle m’a décrit son état d’esprit de l’époque (le côté insouciant et joueur de la jeunesse qui passe à côté de la beauté et de la solennité du lieu). Mais, bien des années plus tard, elle a éprouvé le besoin de venir faire une retraite. Cette personne avait quelque chose d’apaisé en elle, et cette fois-ci, elle a profité de ces quelques jours en pleine conscience. Très beau.

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  2. Je viens d’aller voir ce monastère sur la toile… comme c’est MAGNIFIQUE! Oh! Comme je vous envie… et les lavandes… et l’architecture… comme les pierres de cet endroit doivent vibre, parler… c’est vraiment superbe!

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    • Je vous confirme la haute teneur en énergie de ce lieu hors du commun. Les rochers du plateau sont gorgés d’une énergie tellurique revigorante à souhait.
      Nous savions, il y a peu, que le lieu était déjà habité par les Celto-ligures. Mais lors d’une découverte faite par un retraitant, et néanmoins archéologue, il apparait sans conteste qu’il l’était 8.000 ans avant JC. À cette époque, des pierres attestent l’existence de rites religieux et funéraires.

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