Les Syriaques nous interpellent : « Ne Nous oubliez pas ! »


Durée de lecture : 2mn 20

Les grands humanistes et les tenants de la liberté ont tout fait pour que je m’extasie devant le(s) Printemps arabe(s).
Que d’espoir ! Des peuples se libéraient de dictateurs et de tortionnaires, des images de liesse envahissaient les écrans de télévision. Des dirigeants occidentaux, français en tête, revendiquaient le rôle qu’ils avaient pu jouer pour la progression de la démocratie…
Animés par des calculs mercantiles, espérant des faveurs d’un camp prochainement victorieux, nous avons aussi donné des armes et bien plus encore.
Et puis … et puis, comme à chaque fois, le camp, ou devrais-je écrire, les camps autrefois si vertueux sont devenus à leur tour peu fréquentables.
Malgré cela, les occidentaux n’apprennent toujours pas de leurs erreurs. Ils poursuivent leurs interventions de gendarmes du monde auto-proclamés, tout drapés qu’ils sont du sacro-saint principe de la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Et au final, que de sang versé, que d’illusions perdues !

Écolier, j’ai jadis étudié les empires, perse et ottoman. Des cours d’histoire que j’ai adorés.
Aujourd’hui, je connais à peine les frontières de cette partie du monde et de celles du Moyen-Orient. En revanche, je sais combien la guerre et les horreurs, qui s’y perpétuent depuis trop longtemps au nom de Dieu, mettent à genou les peuples de l’un des berceaux de notre civilisation.
Je connaissais le nom de certaines villes : Antioche, Alep, Palmyre, Ninive, Mossoul, Erevan, …
Je savais aussi que l’on appelait les habitants de Syrie, des syriens ou des syriennes. Mais il a fallu un voyage en compagnie d’une inconnue pour que j’entende le mot syriaque : une langue, une culture et un peuple.
Oh, je n’ai pas retenu grand chose de notre conversation. Jugez plutôt, simplement quelques … détails :
Dialecte de l’araméen, le syriaque est langue officielle dans les empires, assyrien, babylonien et perse. Elle fut la langue d’échange entre les peuples du Moyen-Orient.
Parlée et écrite, c’est sans doute la langue dans laquelle s’exprimait le Christ, et l’une des plus anciennes versions du Nouveau Testament a été écrite en syriaque. Des locutions entières figurent dans les premières traductions de la Bible en grec.
Cette langue officielle va disparaître au gré des persécutions. Au gré des génocides perpétrés jusqu’au XXe siècle, un peuple va disparaître … en silence, et dans une indifférence totale.
300.000 déracinés dans le monde. Encore 60.000 en Syrie avant le début de la guerre, ils étaient moins de 20.000 qui se terraient dans les faubourgs de Damas en ce début d’année. Car après avoir été réprimés par les turcs, par Bachar al-Assad, et regroupés dans un quartier ghetto, ils sont à présent victime d’un nouveau génocide orchestré par l’État Islamique.

Exilée depuis qu’elle a quitté Damas pour faire ses études en France et aux États-unis, la jeune femme assise à mes côtés est une scientifique. Elle exhume la culture syriaque au travers de l’étude de la musique et des chants ancestraux. Des chants et une prière dont elle entendait les paroles dans sa jeunesse, sans toutefois les comprendre.
Aujourd’hui, elle parcourt le monde à la recherche de manuscrits qui auraient pu échapper aux autodafés organisés par Daech, à Mossoul, mais aussi dans les musées, systématiquement détruits lors des conquêtes territoriales de l’État Islamique.
Au cours de notre trop courte conversation, elle m’a calmement appris ce que je n’avais pas encore compris : pour les dirigeants de Daech, il n’y a pas d’histoire en dehors de l’Islam. L’Islam est l’Histoire. Voilà pourquoi, il faut tout détruire. Voilà pourquoi, il faut décapiter tous les impies.

Chaque année, elle tenait à passer Noël à Damas. Depuis trois ans, ses amis lui interdisent de venir, tant ils vivent en insécurité et dans une absolue précarité.
– J’aimerais tellement vous aider, leur dit-elle, fin 2014, lors de leur dernier entretien sur Skype.
– Si tu veux nous aider, sauve notre culture ! … Et puis, demande aux chrétiens d’occident, demande au monde libre, de ne pas nous oublier !

Certes, au lendemain des festivités de « l’independance Day », ce billet d’humeur est dérisoire.
Certes, il sera très peu lu.
Mais c’est tout de même quelque chose, … un bon début !

*****  

Ne m’oubliez pas !!!       
Non pas de vie à trépas
C’est ce qui frappa

C’est bien au-delà
Alors, tu te relevas  
Sans marquer le pas       

Tu compris l’Islam
Mais pas comme une lame
Tranchant l’entame

Comme une religion
Qui préserve les régions
Sans une contagion

Pour laisser un lac
Aux doux reflets, où chaque …
Être est syriaque

Découvrez toutes les illustrations poétiques de Didier Regard

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5 Commentaires

  1. Fabienne Allard Korolev

     /  5 juillet 2015

    Bonjour Pascal, Le malheur est notre incapacité à agir.

    Fabienne ALLARD KOROLEV

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  2. Rien n’est dérisoire quand il s’agit de l’essentiel.
    Merci Pascal, je fais circuler ton témoignage

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  3. très intéressant effectivement. je n’avais pas réalisé cette volonté de nier l’histoire… Merci pour ce post.

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  4. Didier Regard

     /  6 juillet 2015

    Je souhaitais te faire partager des tercets sur tes billets

    BILLET

    Autrefois Pascal
    Du portefeuille de l’idéal
    D’un gain féale

    Là, un tout billet
    Même avec des regrets
    C’est ce qui te plaît

    Car ce n’est monnaie
    Au sein de l’Oliveraie
    Pour panser tes plaies

    C’est ce que tu es
    Et où, personne ne paie
    C’est ce que tu sais

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  5. Didier Regard

     /  6 juillet 2015

    Il y a longtemps que je voulais écrire sur tes billets et le fameux pascal que nous avons connu à l’époque, le billet de 500 francs, le nec plus ultra du riche de l’instant. J’espère que tu apprécieras. Amitiés

    Aimé par 1 personne

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